Fin d’après-midi, fin octobre: il est temps de décrocher de l’écran de l’ordinateur, d’aller prendre l’air et profiter des derniers rayons de soleil de la journée. Nous respirons l’air frais d’automne à plein poumons et chacune de nos cellules s’imprègne du calme et de la sérénité des sentiers jonchés de feuilles craquantes. Après avoir dépassé de beaux épicéas et des frênes déjà bien dégarnis, nous repérons une colonie d’orties nichée dans une petite dépression qui accueille les ruisselets improvisés. Les feuilles urticantes commencent à être un peu piquées par le froid, mais somme toute, elles sont encore bien gaillardes pour la saison ! Voilà qui pourrait donner un peu d’inspiration pour le repas de ce soir…

Cinquante têtes d’orties plus tard, et le bout des doigts endoloris (les températures nocturnes proches du négatif les ont rendues quelque peu agressives ! ), me voici en cuisine. Il y a des restes de riz, et j’ai une vague idée de petite poêlée, avec quelques notes japonisantes. Ah oui, mais voilà… cela fait des mois que je suis sans domicile fixe, tantôt chez des amis, tantôt en famille, bien souvent chez Françoise ! Mes ingrédients japonisants m’attendent sagement dans un carton, quelque part je ne sais plus où à force de déplacer, regrouper, retrier et ré-arranger de manière « plus pratique ».
Je lave les orties, et je les mets à blanchir dans un grand volume d’eau bouillante et salée. Avec de petites orties toute fraîches et tendres de printemps, j’aurais procédé autrement et je les aurais directement mises à cuire à la poêle. Mais celles-là m’ont fait comprendre en cours de cueillette qu’elles étaient plutôt du genre coriaces, et je préfère ne pas prendre de risque.

Pendant que ces belles s’attendrissent, j’inspecte le placard à épices et sauces inattendues, toujours à la recherche d’une note plus ou moins japonisante. En repérant une petite fiole aux allures exotiques, je pense avoir trouvé mon bonheur… Mais quelle n’est pas ma surprise de sortir des étagères une petite bouteille de sauce Worcestershire, qui, d’après son allure, doit fermement s’ennuyer depuis un bon nombre d’années. La trouvaille m’évoque des séjours londoniens, la vie en Écosse, les soirées quiz au pub et soudain, j’ai vraiment envie de découvrir comment les orties peuvent se marier avec une sauce Worcestershire !
Après les avoir égouttées, je les hache grossièrement au couteau, puis je les fais revenir dans un peu d’huile d’olive à la poêle, arrosées d’une première dose de sauce Worcestershire. Je commence à me faire une image gustative de ce nouveau plat, et il me semble qu’un peu de croquant serait le bienvenu : deux poignées de noisettes concassées accompagneront parfaitement ma cueillette locale. Encore un peu de sauce, puis j’ajoute le riz, et je laisse mijoter à feu doux pendant encore cinq à dix minutes. Il n’y a plus qu’à passer à table !

Voilà comment les orties se trouvent désormais être une spécialité britannique, particulièrement appréciée un soir d’automne, après une belle promenade de fin de journée…
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