La botanique par les mots : “chaton”

Un chaton de quelques jours !

Vous avez certainement déjà entendu dire que certains arbres portent des chatons : qu’est-ce qu’on désigne exactement par ce terme inattendu en botanique ? Vous vous en doutez bien, ce n’est pas cette petite boule de poils charmante, qui miaule et qui fait plein de bêtises… quoique il y aurait presque une ressemblance :D. Les chatons dont nous parlons sont moins démonstratifs, mais peuvent devenir tout aussi attachants ! Ils ont un côté doux, je le concède, qui peut même donner envie de les caresser… mais vous ne les entendrez jamais ronronner ;).

Un chaton de quelques jours !

Les chatons des arbres font généralement leur apparition en fin d’hiver, ou en cours de printemps, parfois même avant l’apparition des feuilles : ce sont alors les premiers signes que l’arbre reprend une certaine activité. D’un point de vue botanique, un chaton est une inflorescence, c’est à dire un ensemble de fleurs, avec tout de même quelques particularités…

Tout d’abord, chez les chatons on ne mélange pas les torchons et les serviettes… Si dans le règne végétal la plupart des fleurs sont bisexuées, chez les chatons, tout est très ordonné de ce point de vue : on a les chatons mâles d’un côté, et les inflorescences femelles de l’autre, qui sont parfois également organisées en chatons. Souvent les fleurs femelles sont insérées par 2 ou 3 à la base du chaton mâle, comme pour les noisetiers (Corylus spp.) par exemple, où la fleur femelle dépasse à peine d’un bourgeon pas tout à fait ouvert, et se laisse polliniser par le pollen abondamment distribué par les chatons mâles.

Chatons mâles de noisetier (Corylus avellana), surmontés des fleurs femelles
Chatons mâles de noisetier, surmontés des fleurs femelles

Le mot fleur vous évoque peut-être de beaux pétales et un parfum suave ? Oubliez tout cela avec les chatons : ils sont allés au plus simple, au plus utile, au plus rapide. Point de pétales donc, ni même de sépales, juste les appareils reproducteurs (étamines chez les mâles et ovaires chez les femelles), dans leur tenue la plus simple et la plus humble, afin d’être le plus efficaces possibles. Chacun est inséré à l’aisselle d’une bractée (comprenez : une feuilles modifiée pas très loin d’une fleur 😉 ), qui prend généralement l’aspect d’une sorte d’écaille.

Chatons mâles du bouleau (Betula pendula), surmontés par le chaton femelle
Chatons mâles du bouleau (Betula pendula), surmontés par le chaton femelle

Tout ce petit monde est directement attaché à la tige de l’inflorescence, sans pédoncule (une petite tige particulière à la fleur) : en botanique on appelle ça un épi. Mais ne vous y méprenez-pas, organisation ne rime pas avec monotonie ! Les chatons se permettent des fantaisies suivant les espèces : ils peuvent présenter des fleurs très serrées, comme pour les chatons mâles des noisetiers, ou des écailles velues, ce qui les rend tout doux, comme chez le saule marsault (Salix caprea) ; ils peuvent être composés, comme chez les bouleaux, ou même globuleux, comme chez les hêtres !

Chatons de saule marsault (Salix caprea)
Chatons velus du saule marsault (Salix caprea)
Chaton arrondi du hêtre (Fagus sylvatica)
Chaton arrondi du hêtre (Fagus sylvatica)

En France métropolitaine, quatre familles ont opté pour les chatons : les Bétulacées (bouleaux, noisetiers, aulnes…), les Fagacées (châtaigniers, chênes, hêtre), les Moracées (peu représentés en France, ils comptent parmi leurs membres le mûrier noir, Morus nigra) et les Salicacées (saules et peupliers).

Parmi ces espèces, vous en aurez certainement reconnu quelques-unes qui s’illustrent chaque année par leurs propriétés allergisantes… dues aux fameux chatons ! Eh oui, car point de pétales veut dire point d’efforts pour attirer les insectes pollinisateurs : c’est donc le vent qui est chargé de transporter le pollen. Or, si en confiant son pollen à une abeille, on sait qu’elle a de grandes chances d’aller visiter une Madame de son espèce, et d’y déposer le précieux pollen en question… quand on le confie au vent, c’est le contraire : on sait qu’il va aller se balader partout, et qu’il y a très peu de chances qu’il rencontre une fleur femelle. Alors on démultiplie les chances d’une possible rencontre, et on produit en masse, en espérant que quelques grains trouveront leur chemin dans le vaste monde ! Et au passage on incommode quelques humains dont le système immunitaire s’emballe bien vite ;).

Chaton mâle de peuplier (Populus nigra)
Chaton mâle de peuplier (Populus nigra), qui produit un pollen très allergisant
Chatons femelles de peuplier (Populus nigra)
Chatons femelles de peuplier (Populus nigra)

Ces quelques inconvénients ne sauraient ternir le charme de ces charmantes inflorescences printanières, bien atypiques, qui viennent parfois orner nos intérieurs lorsque l’on ramène quelques branches de saule encore en boutons qui éclosent dans nos intérieurs chauffés, ou nos assiettes lorsque l’on se lance dans la cuisine des chatons de noisetier ! Mais ça, c’est une autre histoire… 😉

Noisetier en hiver
Noisetier en hiver : les chatons sont déjà visibles en janvier

Crédits photos (dans l’ordre d’apparition dans l’article) : chaton : Caroline Calendula ; Chatons mâles de noisetier, surmontés des fleurs femelles : Corylus avellana par Liliane Roubaudi, via Tela Botanica, licence CC BY-SA 2.0 ; Chatons mâles du bouleau, surmontés par le chaton femelle : Betula pendula par Paul Fabre, via Tela Botanica, licence CC BY-SA 2.0 ; Chatons velus du saule marsault : Salix caprea par Hervé Goëau, via Tela Botanica, licence CC BY-SA 2.0 ; Chaton arrondi du hêtre : Fagus sylvatica par Michel Pourchet, via Tela Botanica, licence CC BY-SA 2.0 ; Chaton mâle de peuplier : Populus nigra par Sylvie Carbonnet, via Tela Botanica, licence CC BY-SA 2.0 ; Chaton femelle de peuplier : Populus nigra par Mathieu Menand, via Tela Botanica, licence CC BY-SA 2.0 ; Noisetier en hiver : Caroline Calendula

Publié par carolinecalendula

Ethnobotaniste, auteure, conférencière et formatrice Créatrice culinaire Co-directrice éditoriale et rédactrice : l'Aventure au Coin du Bois

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